Les praticiens le savent, la protection d’une marque en Allemagne est une stratégie souvent gagnante, mais parfois périlleuse.
Qu’il s’agisse de l’enregistrement d’une marque en Allemagne ou de la désignation du territoire allemand par une marque internationale existante, le redoutable office allemand des brevets et des marques (le DPMA) analyse scrupuleusement les demandes de marques avant de les enregistrer au registre national.
Il n’est malheureusement pas rare de se voir opposer un « refus provisoire » partiel ou total de l’octroi de la protection du droit des marques en Allemagne, pour manque de distinctivité ou caractère trop descriptif.
A titre d’exemple, lorsque le titulaire d’une marque internationale souhaite désigner simultanément la France et l’Allemagne comme territoires de protection, les offices respectifs sont tenus de se prononcer sur la recevabilité de la demande conformément au protocole de Madrid.
Dans cette situation, malgré le haut niveau d’harmonisation européenne dans ce domaine du droit, il est fréquent que les offices français et allemand rendent une décision différente au sujet d’une demande de marque identique.
Le cas échéant, vous l’aurez compris, c’est systématiquement l’Allemagne qui refuse l’enregistrement alors que l’office français, l’INPI est plus conciliant.
L’office allemand des marques a en effet la réputation d’opérer un contrôle très sévère des conditions d’enregistrements d’une marque, notamment au regard des motifs absolus de refus du paragraphe 8 de la loi allemande sur les marques (§ 8 MarkenG).
Le refus provisoire partiel ou totale du DPMA sonne-t-il le glas de la protection du signe sur le territoire allemand ?
Bien sûr que non, mais l’octroi de la protection de sa marque en Allemagne, cela se défend.
Le refus provisoire partiel ou total
En cas de refus, le titulaire d’une marque internationale ayant désigné l’Allemagne reçoit une notification de refus provisoire de la part de l’office allemand, précisant le fondement du refus de l’enregistrement de la demande de marque sans plus d’explication.
Le titulaire dispose alors d’un délai de 4 mois à compter de la date de notification du refus provisoire par l’office internationale (WIPO) pour nommer un représentant autorisé devant le DPMA (par exemple, un avocat établi en Allemagne). Dans le cas d’une demande nationale, ce délai est réduit à un mois à compter de la notification de l’examinateur.
Si un représentant est constitué devant le DPMA dans le délai prescrit, l’examinateur transmet à ce représentant de manière plus détaillé dans le cadre d’une lettre, les raisons ayant motivé le refus de l’enregistrement et invite le titulaire à soumettre ses observations dans un nouveau délai de trois mois.
Si aucun représentant n’est constitué devant le DPMA dans le délai initial de 4 mois ou si aucune réponse n’est communiquée au DPMA dans le nouveau délai de 3 mois prescrit par la lettre de l’examinateur, la notification de refus provisoire est simplement confirmée sans plus de détails.
Si le titulaire souhaite soumettre en réponse à l’argumentation de l’examinateur, des observations au soutien de sa demande, l’office doit alors se prononcer sous forme de décision (Beschluss).
A ce stade, le DPMA, qui ne saurait se contredire, se prononce quasiment systématiquement en défaveur de la demande de marque. L’enregistrement de la demande de marque en Allemagne est donc refusé.
Afin de sauver sa demande de marque, le titulaire dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de la Beschluss, pour introduire une des voies de recours disponible, soit une Erinnerung ou une Beschwerde.
La Erinnerung est une procédure d’appel interne devant le DPMA, dont les taxes s’élèvent à 150 € et qui mène, bien trop souvent, à la confirmation de la décision initiale. Nous la déconseillons.
La Beschwerde est une procédure de recours par voie de réclamation devant le Tribunal fédéral des brevets (Bundespatentgericht, BPatG). L’affaire est présentée une ultime fois devant le DPMA qui peut décider de changer d’avis in extremis puis entièrement réexaminée par une division spécialisée du Bundespatentgericht.
Le recours direct à la Beschwerde permet d’accélérer la procédure (sans passer par la Erinerung) et apporte un regard neuf sur la demande d’enregistrement en permettant de fournir une argumentation détaillée contre la décision de l’office allemand. La pratique du Bundespatentgericht est plus proche de la jurisprudence européenne et explique, en partie, les statistiques de succès bien plus importantes des demandes de marques devant cette cour.
Il est cependant important de souligner que ces statistiques reflètent les cas dans lesquels une Beschwerde a effectivement été engagée, à l’exclusion de ceux dans lesquels la demande de marque a simplement été abandonnée.
Quelle conclusion tirer de la difficulté d’un enregistrement de marque sur le sol allemand ?
D’aucun pourrait penser qu’il serait plus facile de passer par la voie d’une demande de marque européenne, dont les délais d’enregistrement avec la procédure Fast-Track et une démarche 100 % en ligne battent tous les records et qui permet d’obtenir une protection en France et en Allemagne. L’EUIPO est très exigent en termes de distinctivité de la marque, mais moins que l’office allemand.
Il ne faut pas oublier cependant qu’une marque enregistrée n’est pas une marque éternelle. En effet, même après son enregistrement, la marque française, allemande ou européenne reste susceptible d’être invalidée dans le cadre d’une procédure de nullité pour défaut de caractère distinctif par exemple. Le titulaire se verrait alors déchu de ses droits et dans certains cas, condamné au paiement des frais exposé par l’autre partie.
Quels que soient les objectifs du déposant, il est donc toujours recommandé de se faire bien conseiller par un professionnel sur son projet de marque et sa stratégie de demande de marque en Europe préalablement au dépôt et de ne pas hésiter à défendre sa demande de marque en cas de refus provisoire. Nous serons ravis de vous accompagner si vous rencontrez de telles difficultés.
MARS IP est fier d’accompagner ses clients dans le choix de leurs marques, leurs stratégies de dépôt et en cas de refus par l’office et autres procédures.
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